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Les mineurs étrangers non accompagnés (MENA)

Les mineurs étrangers non accompagnés sont devenus, en une dizaine d’année, une nouvelle population du travail social. Déjà dans un article d'avril 2003 dans la revue Lien social, (voir l’article de Joël Plantet : Lien Social ) 10% des jeunes confiés à l’ASE de Paris étaient des mineurs isolés. Ce chiffre a depuis continué d'augmenter (particulièrement à Paris, dans la Seine Saint Denis, le Nord, puis par diffusion, à partir de ces pôles d'accueil.)

L’accompagnement éducatif de ces jeunes est particulièrement complexe car leurs problématiques, leurs statuts et leurs perspectives de statut à la majorité provoquent de fortes réactions idéologiques, avec une tension contradictoire entre accueil et rejet, qui se traduit, surtout en actes,par des décisions contradictoires dans des situations comparables, faute d’un débat démocratique approfondi.

Une situation très confuse donc, car les situations, les parcours sont complexes, mais aussi les lois, les dispositions légales, et…leur application…
Le livre de Julien Bricaud, « MINEURS ETRANGERS ISOLES – L'EPREUVE DU SOUPCON », éditions VUIBERT 2006, décrit bien l’émergence de ce phénomène, comment la massification de ce problème révèle et produit des dysfonctionnements institutionnels, mais aussi un nouveau travail social qui se constitue, associant des partenaires très variés autour de ces problématiques : les juges des enfants, les juges des tutelles, les services médicaux légaux pour les expertises osseuses, les administrateurs ad hoc, la préfecture, l'OFPRA et la direction du travail concernant le statut des mineurs et des jeunes majeurs, les ambassades et consulats, les associations qui ont développé un soutien juridique très pointu, les interprètes, etc....
C’est donc un accompagnement qui ne s’improvise pas et demande des ressources institutionnelles importantes.
Julien Bricaud pointe les difficultés de ce travail, tout d’abord les différences de statut qui font que tous les jeunes n’ont pas la même légitimité à être là ; le mensonge qui peut être une nécessité pour eux et qui confronte à l’épreuve du soupçon, à la méfiance des deux côtés.

Présentation de l'éditeur :
« Le phénomène des mineurs étrangers isolés prend de l'ampleur depuis une dizaine d'années. Il concerne au premier chef les travailleurs sociaux amenés à les accueillir au sein du dispositif de protection de l'enfance. Cet accueil suscite de multiples interrogations. Qui sont ces mineurs ? Que cherchent-ils dans la migration ? Comment les accompagner ? Est-ce bien la mission de la protection de l'enfance ? Ces questions font débat. Autour d'elles se dessinent des positions professionnelles et politiques, selon des clivages qui orientent la protection effectivement accordée aux jeunes. Quand on choisit d'accompagner ces mineurs, les incertitudes sont nombreuses quels dispositifs d'assistance faut-il solliciter ? Vers quels horizons ces jeunes peuvent-ils se projeter ? L'avenir semble souvent incertain. Voilà qui pèse sur l'organisation d'un parcours d'"intégration " et fragilise les travailleurs sociaux qui s'insurgent contre le " bricolage " permanent auquel ils se trouvent réduits. Faut-il s'étonner dès lors que l'accompagnement des mineurs étrangers isolés soit tour à tour l'objet d'une certaine méfiance ou à l'inverse d'un fort investissement de la part des professionnels ? Dans un contexte qui oscille entre fascination et rejet, il devient urgent de construire des pratiques professionnelles exigeantes. Pour explorer de possibles pistes d'intervention, on propose ici de rapporter des pratiques qui tiennent compte d'un environnement incertain tout en respectant la singularité des jeunes accompagnés. »

L’intérêt du texte de 2002 d'Angelina Etiemble, « Quelle protection pour les mineurs isolés en France ? » est de fournir une typologie qui aide à distinguer de grandes problématiques. Une typologie, non pour enfermer dans des cases, mais pour penser des différences, essayer de se représenter des réalités à un niveau plus collectif. C’est d’ailleurs ce qui est déroutant au début de l’accompagnement des mineurs isolés , l’expérience d’avoir été touché par un récit, puis l’étrangeté qu’il y a à entendre exactement le même récit dans la bouche d’un autre adolescent, réaliser que beaucoup d’entre eux ne peuvent pas, ne doivent pas faire confiance aux adultes qui les accueillent.
Angelina Etiemble, dans son enquête pour le ministère des Affaires sociales (DPM 2001) propose de distinguer :

  • les exilés,
  • les mandatés,
  • les exploités,
  • les fugueurs,
  • les errants
Le CAOMIDA propose dans sa présentation de rajouter une typologie : les rejoignants.

Voici le début du texte d'Angelina Etiemble :
«Une figure migrante nouvelle fait son apparition au milieu des années quatre-vingt-dix : le mineur isolé étranger. Il est défini comme une personne étrangère de moins de dix-huit ans sans représentant légal sur le territoire français. La coordination Réfugiés élabore un premier document en 1997 concernant cette population méconnue. Puis l’augmentation du nombre des mineurs, les questions qu’ils soulèvent, transforment leur présence en problème social et politique. Les interrogations sont nombreuses : qui sont ces enfants ? Combien sont-ils ?
Comment sont-ils venus en France et pour quelles raisons ? Quelles réponses politiques et sociales donner à cette figure migrante singulière ?»

En 2012, Angelina Etiemble a repris et affiné sa typologie, qui passe à 7 catégories, chacune d'entre elle se divisant en sous-catégories; Ainsi un mineur mandaté par sa famille n'est absolument pas dans la même situation s'il est mandaté pour étudier ou pour travailler. Dans le premier cas il sera très probablement très aidé (e d'abord par l'éducation nationale) ; dans le second il sera confronté à un parcours d'obstacles.
Voci la typologie de 2012 : de 5 à 7 types

  • Type 1 : Le mineur exilé : une figure plus sociétale que politique
  • Type 2 : Les figures du mineur mandaté : le travailleur, l’étudiant, l’initié
  • Type 3 : Le mineur-exploité : une figure plus féminine
  • Type 4 : Le mineur-fugueur et ses figures : le primo-fugueur, le fugueur-réitérant
  • Type 5 : Le mineur-errant et ses figures : le mineur-dans la rue, le mineur-de la rue
  • Type 6 : Les figures du mineur-rejoignant : l’envoyé, le confié, le successeur
  • Type 7 : Le mineur-aspirant : une figure contemporaine
Lire la synthèse "« ACTUALISER ET COMPLEXIFIER LA TYPOLOGIE DES MOTIFS DE DEPART DU PAYS D’ORIGINE DES MINEURS ISOLES ETRANGERS PRESENTS EN FRANCE »

Voir aussi le site de la revue Hommes et migrations : Hommes et migrations )

Pour en savoir plus, voir le site web : http://www.hommes-et-migrations.fr/articles/1251/1251p1.html

Date de cet article : 2007-09-11


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