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La notion de projet de vie en protection de l'enfance.

La notion de projet de vie provient du monde anglo-saxon, où elle a été utilisée successivement par des professionnels tout d'abord de la psychiatrie, puis des champs du handicap et de la protection de l'enfance, puis de la gériatrie et enfin de l'insertion professionnelle.

Un aspect contradictoire de la notion de projet de vie est qu'elle est utilisée par des professionnels pour accompagner des personnes vivant en institution, alors que sa conception originelle est anti-institutionnelle.

Historiquement la notion est née dans les années 70 alors que se déroule un vaste mouvement de désinstitutionalisation, ce que les québécois vont nommer le virage milieu, ou l'approche milieu.
Ce virage consiste à passer d'un modèle dans lequel l'institution est au centre, avec comme perpétuelle question l'adaptation de la personne placée à l’institution, à un modèle centré sur la personne, ses appartenances, son histoire, ses liens et son insertion en milieu ordinaire. La notion de projet de vie est donc une notion anti-institutionnelle visant à prévenir des dérives des institutions totales, au sens de Gofmann. Plus l'institution prend en charge, moins l'insertion sociale est nécessaire, ce qui se paye pendant l'accueil (moindre appartenance sociale) et après (isolement). Cet aspect anti-institution a été poussé très loin dans le monde anglo-saxon puisque la loi interdit les placements de longue durée en institution ; le projet de vie vient alors comme recherche d'un lieu de vie non institutionnel, ordinaire.
Dans son rapport de 2004, le groupe d'experts travaillant sur la révision de la loi québécoise sur la protection de la jeunesse dit ainsi : « le maintien ou le retour de l’enfant dans son milieu familial demeure généralement la première option à envisager, dans la mesure où les capacités parentales peuvent être restaurées dans un délai raisonnable. Il demeure ainsi essentiel que des efforts soient faits pour maintenir ou réinsérer l’enfant dans son milieu familial et pour fournir aux parents toute l’aide dont ils ont besoin. Cependant, à défaut de pouvoir restaurer, à court terme, les capacités parentales, particulièrement dans le cas de très jeunes enfants, ce seront les besoins de continuité et de stabilité de l’enfant dans un milieu de vie substitut qui devront guider les actions à entreprendre. ».
La théorie des cercles
Cela correspond à ce que j'appelle la théorie des cercles : 1° cercle : tout faire pour que les parents puissent élever et protéger leurs enfants, si cela n'est pas possible ou réussi dans un délai raisonnable, les services de protection doivent chercher un projet de vie dans la famille élargie ; si cela n'est pas possible ou évalué comme non souhaitable, alors il faut chercher à proximité de la famille, dans le 3° cercle, le cercle communautaire. Seulement à défaut le 4° cercle est envisagé. C'est alors un grave problème car on déracine l'enfant.

Le projet de vie renvoie donc au paradigme d'un double encrage : d'une part dans un milieu familial, c'est l'appartenance ; d'autre part dans le temps, c'est la stabilité.

Si la recherche acharnée de l'ancrage dans le milieu familial se paie d'une absence d'ancrage dans le temps : l'enfant est alors ballotté à droite à gauche, toujours provisoirement, alors il vaut mieux un milieu substitutif stable, ce qui n'empêche pas le maintien des liens avec les parents, mais sur une autre base que celle d'un projet de vie ensemble.

Date de cet article : 2014-03-01


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